Occuper pleinement son espace de citoyen, c’est prévaloir efficacement ses droits

Occuper pleinement son espace de citoyen, c’est prévaloir efficacement ses droits

  • Affirmation du Vice-président du Conseil Interculturel de Montréal Monsieur Frantz Benjamin
  • par Marie Flore Domond

Que révèle l’histoire de la réalité actuelle du Québec lorsqu’il s’agit de justice sociale, du respect des autres individus ou groupes qui forment la société, de leur identité propre et collective ainsi que le rapport d’appartenance de ces immigrants, des néo-québécois ? En définitif, c’est la sous-représentation outrageuse de certains milieux sociaux : des communautés culturelles ou minorités visibles qui ont pourtant cédé à moult sacrifices à leur dépens et qui ont contribuées au développement économique, culturel et social du pays. Le Conseil interculturel de Montréal est conscient de l’ensemble de la problématique et a donc décidé de prendre considération des failles du système et agit en tant qu’aviseur auprès du conseil municipal de la Ville de Montréal.

J’ai rencontré monsieur Frantz Benjamin l’auteur d’un dossier paru dans le calendrier du Mois Créole de Montréal édition 2004 intitulé : LE CRÉOLE : outil d’intégration et de développement de la communauté haïtienne. – « Une intégration réussie de la personne d’origine immigrante passe nécessairement par une compréhension des différents  mécanismes et enjeux de la société d’accueil dans le but d’y avoir une prise comme citoyenne et citoyen » -. Le mot clé à retenir dans cette déclaration est le thème ’’prise’’ qui signifie avoir le contrôle, détenir le pouvoir, exercer ses droits. Selon les propos du vice-président, c’est l’élément primordial dans la lutte de profilage racial. – « Je n’interviens pas seulement comme Haïtien dans ma démarche de militance, je suis Montréalais d’origine haïtienne et je l’inscris dans une perspective de citoyen à part entière. Il m’arrive de terminer une semaine complètement frustré, cela fait partie du jeu de la militance. Par moment, je suis fier des projets et des causes que nous revendiquons » -.  J’ai donc voulu savoir quels sont ces causes et ces projets qui priment pour les actionnaires, les partenaires de l’intégration et le fondement de leur mandant en passant par la structure du conseil. – « Le conseil est formé d’une quinzaine de membres issus de différentes communautés culturelles et de presque tous les milieux. Comme échantillon, on retrouve des professeurs d’université, des chercheurs, des gens du milieu institutionnel, du milieu des affaires, des directeurs d’école, des commissaires scolaires, des personnalités militantes. L’apport de toutes ces compétences forme une pluralité qui nous oriente forcément vers l’amélioration de la qualité de vie des citoyens et une intégration plus harmonieuse. C’est de là que provient l’essence de nos réflexions. Identifiés à ce segment, nous nous préoccupons principalement des problématiques de l’intégration proprement dite concernant les programmes d’accès à l’emploi. J’ai co-présidé le Groupe de travail sur le profilage racial à Montréal et notre action a été de comprendre, questionner et agir pour combattre cette forme de discrimination dans la ville de Montréal. Pour ce faire, noua avons fait appel à des experts dans différents domaines (droit, sociologie, psychologie, etc.) les domaines concernés. Le Conseil interculturel de Montréal (CIM) a fait des interventions dans le cadre de l’élaboration de la politique du patrimoine de la ville de Montréal. Pour arriver à réaliser les objectifs fixés, nous avons retenu l’approche de l’observation (étude, documentation, analyse) en premier lieu et de proposition (recommandation, mémoire, résolution) dans un second temps.>>

<< Un autre dossier sur lequel je me suis personnellement impliqué est celui du Groupe de travail sur les communautés noires mis en place par le Maire de Montréal en collaboration avec plusieurs leaders des communautés noires. Depuis plusieurs mois maintenant, une soixantaine de leaders des communautés haïtienne, africaine, et anglophone consacrent du temps à réfléchir à haute voix sur les enjeux des priorités de chaque arrondissement dont celui de Rivière des Prairies – Montréal est – Pointe-aux-Trembles. En ce qui concerne Montréal, nos priorités sont les suivantes : la création d’emploi, le logement, la prévention de la criminalité, le soutien aux familles.>>

<< Le Maire de Montréal avait annoncé en début d’année la création de mille (1000) postes qui seraient réservés aux groupes cibles (femmes, minorités visibles et personnes handicapées). Si l’on tient compte de l’ensemble des besoins de la population immigrante c’est nettement insuffisant !  Beaucoup de jeunes ne comprennent pas pourquoi ils ne font pas partie des mesures favorisant l’inclusion, Ils sont très conscients de leur exclusion par contre. Je persiste à croire que l’amélioration des conditions de vie de nos jeunes passe par l’emploi. Et en ce sens, le réseautage est un excellent moyen d’y parvenir.  C’est un levier auquel qu’on peut et on doit passer pour corriger des lacunes. Je connais une cohorte de gens qui ont su prendre leur place via le mentorat ou le réseautage .>>

À ce niveau, il admet que la discrimination systémique existe à l’égard des minorités visibles, des femmes, des personnes handicapées et que pour briser les barrières et les obstacles administratifs, il faut exiger une plus grande volonté politique. Il s’est prononcé énergiquement sur le coup : « Je ne cesserai jamais de dire qu’il faut prendre sa place, exercer ses droits car c’est d’abord les actions citoyennes qui alimenteront les actions politiques dans le futur. Les élus municipaux sont là  pour administrer selon les besoins et priorités de la population. Cependant, il faut y participer. Se résoudre à aller voter quand il le faut. Se présenter à la mairie, au conseil de ville pour questionner les élus lors des assemblées. Le conseil d’arrondissement se teint une fois par mois ainsi que le conseil de ville à l’Hôtel de ville. Le conseil que j’ai à donner aux citoyens c’est de s’informer et de s’impliquer dans les affaires qui leur concernent. Figurez-vous que le taux de participation de notre communauté aux élections municipales dépasse rarement le seuil des 30%. Alors qu’on a rien à perdre et tout à gagner en terme de respect. Je répète que la participation est fondamentale, elle nous permet de faire avancer les choses. Une autre attitude navrante, c’est de voir des compatriotes haïtiens qui refusent de s’asseoir sur une même table en raison de leur divergence d’opinion politique ou autres. Les problèmes d’Haïti ne se règleront jamais ici. Cela étant dit, je ne prétends pas qu’il faut tourner le dos ni être insensible à ce qui se passe dans le pays. Au début, je parlais du fondement légal, à présent nous en sommes au fondement moral vis-à-vis  de nos confrères. Dans chaque arrondissement, les groupes défavorisés devraient converger leurs voix, canaliser leurs compétences pour exiger la mise en application des lois, des politiques et des directives visant l’équité et la justice sociale. Les programmes d’accès à l’égalité à l’emploi en premier lieu.

Au niveau de la communauté haïtienne, présentement, un groupe a pris l’initiative et la résolution d’envoyer au Maire un projet de soutenir les démarches d’un parc au nom de Toussaint Louverture à l’occasion du Bicentenaire. Une telle action marquerait un signe concret de l’abolition de l’esclavage. Le chantier historique serait dans le quartier de Saint-Michel. C’est un projet à caractère municipal, il doit être approuvé par les administrateurs de  l’arrondissement. Une communauté qui regorge de talent comme la nôtre doit se donner des objectifs à court, à moyen et à longs termes. Je crois qu’il est possible de développer le réseau de compétence par l’information. Mais il nous faut un peu plus d’élan de solidarité à l’intérieur de la communauté. De plus, nous avons intérêt à dialoguer davantage. Nous devons nous efforcer à être un peu plus  tolérant et réviser notre SENS DU CONCENSUS. Comment articuler les dossiers politique en tant qu’haïtien ! Je vous l’affirme. Il faut contester, se questionner et remettre en question tout ce qui nous concerne. société 2004, publié le 10-06-05